Quand Twitter dira stop

twitter cigarettes

En début de semaine dernière, Fred Wilson constatait que l’activité de Twitter issue de ses applications tierces augmentait à vue d’oeil:

You can talk about Twitter.com and then you can talk about the Twitter ecosystem. One is a web site. The other is a fundamental part of the Internet infrastructure. And the latter is 3-5x bigger than the former and that delta is likely to grow even larger. (On parle de Twitter.com, et on parle de l’écosystème Twitter. Le premier est un site Web. Le second est un élément fondamental de la structure d’Internet. Ce second est 3 à 5 fois plus grand que ce premier, et cet écart est bien parti pour continuer à accroitre.)

Indéniablement, les applications Twitter permettent de moduler la plateforme technologique Twitter selon les besoins des utilisateurs. Exemple récent, Seesmic se positionne comme la porte d’entrée au monde de Twitter avec Seesmic Look. De plus, Twitter offre via ses APIs des services non-inclus dans Twitter.com (relocation), une aubaine pour les développeurs.

Cependant, la semaine dernière a été le grand retour de la Fail Whale sur Twitter, il convient d’analyser une fois de plus le potentiel de croissance de Twitter. Que Twitter.com soit touché par une rupture de courant, c’est courant 🙂 Par contre, la coupure de service a aussi affecté les API Twitter, et c’est a ce sujet que j’aimerais rebondir sur le billet de Fred Wilson.

Depuis ses débuts, Twitter a imposé une limite de 100 API calls/heure par utilisateur du réseau social. Sans limitation, Twitter s’exposerait au risque de devenir une plateforme inondée d’information tweetée automatiquement. Quoique frustrant, le concept de limitation par utilisateur est généralement bien accepté et surtout nécessaire.

Cependant, début 2009, Twitter changea sas politique laisser-faire qu’elle avait toujours eu avec ses développeurs, et fixa le nombre de requêtes API à 20 000 par heure pour toute application, whitelistée ou non. Le mal se fit sentir:

Right now it takes 400 requests alone to get Robert
Scoble’s followers. It takes 350 requests to get Guy Kawasaki’s followers.
It takes similar to get Chris Pirillo’s followers. Does this mean we just
exclude allowing them on our apps now?
(Aujourd’hui il faut effectuer 400 requêtes juste pour obtenir la liste de followers de Robert Scoble. Il faut 350 pour obtenir la liste de followers de Guy Kawasaki, et pareil pour Chris Pirillo. Cela veut-il dire qu’il faille les exclure de nos applications pour le moment?)

En imposant cette limite aux développeurs, Twitter les força écrire des applications plus autonomes et plus économiques, où les informations tirées de l’API Twitter ne sont pas juste consommées et jetées, mais aussi triées et mises en cache. Ceci permit d’éclaircir les horizons du côté de l’API Twitter, ainsi que de garantir sa stabilité face au fort taux d’adoption de la plateforme de microblogging.

Et effectivement, 6 mois plus tard, Twitter annonce que le nombre d’accès autorisés à l’API pour les utilisateurs passe de 100 à 150 par heure. Ce fut une petite bouffée d’oxygène pour l’écosystème Twitter.

Encore plus fort, fin 2009, l’équipe Twitter annonce que ce chiffre de requêtes API par utilisateur va passer de 150 a 1 500! Wow! Non seulement ça, mais Twitter a aussi promis aux développeurs Twitter un accès illimité au firehose Twitter (pré-annoncé à LeWeb09), le même pour lequel Google a payé 15 millions en Décembre 2009. L’écosystème Twitter s’émule.

Aujourd’hui, fin Janvier 2010, les promesses de Décembre ne se sont pas encore concrétisées. Par contre, je lis a droite a gauche des histoires qui ne dressent pas un portrait aussi dynamique de l’API Twitter.

Début Janvier, c’est le site Getclicky, spécialisé dans l’analyse de trafic en temps réel, qui annonce ne plus tracker le nombre de followers de nos profils Twitter. L’équipe explique qu’elle utilisait l’API de Twittercounter pour connaitre le nombre de followers de chaque compte. Avec la limitation à 20 000 requêtes par heure, l’équipe Getclicky déplore que les données Twittercounter sont souvent vieilles d’un jour ou deux, ce qui rend le service complètement inutile pour leur produit d’analyse « temps réel ».

Dans le cas de TwitterCounter, les changements annoncés par Twitter fin 2009 devrait arranger le problème. Cependant, les limites de l’API Twitter ne seront plus technologiques, mais surtout politiques:

Une semaine après Getclicky, c’est SocialToo qui écrit pour annoncer que, sur demande écrite de Twitter, ils retiraient l’option auto-unfollow. Il ne s’agit pas ici d’une faiblesse de l’API Twitter (du moins pas officiellement), mais du fait que Twitter n’apprécie pas que SocialToo mette autant d’importance sur le nombre de followers dans son service. Twitter cherche à ce que la popularité des utilisateurs sur Twitter reflète la popularité de ces utilisateurs dans la vraie vie. Par exemple, en créant la SUL (Suggested User List), Twitter a repris le contrôle sur la tête de classement de ses utilisateurs les plus populaires, mettant ainsi au placard tout marketer ou personnalité indésirable. Aujourd’hui, les utilisateurs les plus populaires et les plus influents ont été prônés directement par la SUL de Twitter (lire Dave Weiner pour plus d’info sur la SUL).

Ainsi j’aimerais donc mettre en perspective l’enthousiasme de Fred Wilson vis-à-vis de l’écosystème Twitter et de son potentiel de développement: Certes Twitter a su surmonter ses challenges technologiques, et promet maintenant une augmentation hallucinante de leur performance, ce qui rend très optimiste face à l’avenir. Cependant, contrairement à Youtube, Twitter ne cherche pas à créer de nouvelles stars, mais plutôt à refléter la popularité de chacune d’elle sur sa plateforme. Ainsi toute application offrant aux utilisateurs des méthodes mécaniques d’accroissement d’audience seront maintenant traquées.

Twitter cherche à devenir un media d’information. La spécificité de Twitter, c’est que ce sont les utilisateurs qui sélectionnent en temps réel les infos importantes via le retweet. Le nombre de followers est un facteur important dans l’algorithme qui tracke les nouvelle fraiches. Twitter ne veut donc plus que les utilisateurs jouent au jeu du follower’s count, celui-ci même qui généra autant d’émulation autour de la plateforme de microblogging dans ses premières heures. Cependant, plus Twitter sera reconnu comme une source valide d’information, plus on tentera de manipuler son algorithme via des applications spécialisées, et plus Twitter se devra d’imposer de lourdes restrictions à ses développeurs, ce qui sera un frein certain a la croissance de son écosystème.

Un peu de patience, ce n’est pas le type de décision qui se prend lorsqu’une plateforme est en plein boom, mais cette nouvelle attitude ne devrait plus trop tarder à se faire ressentir.