Des accusations de dopage excluent la Russie des prochains J.O.

Le comité exécutif de l'Agence mondiale antidopage (AMA) a interdit la Russie aux Jeux olympiques et aux championnats du monde pendant quatre ans. C’est la sanction la plus sévère jamais décrétée à ce jour dans ce chapitre du scandale russe du dopage, qui dure depuis des années.

Le comité exécutif de l’Agence mondiale antidopage (AMA) a interdit la Russie aux Jeux olympiques et aux championnats du monde pendant quatre ans. C’est la sanction la plus sévère jamais décrétée à ce jour dans ce chapitre du scandale russe du dopage, qui dure depuis des années.

Ceci signifierait que la Russie ne pourrait pas se présenter offici­ellement aux Jeux d’été de 2020 à Tokyo ni aux Jeux d’hiver de 2022 à Beijing. De plus, elle serait exclue de la plupart des grandes compétitions internationales jusqu’en 2023, y compris la Coupe du monde de la FIFA, les Jeux Olympiques de la jeunesse, les Jeux paralympiques et tout autre évènement sportif assujetti au Code mondial antidopage.

Les athlètes, les premiers endommagés

Le Comité olympique international (COI), aussi signataire du Code, a demandé que telles restrictions soient imposées aux officiels russes plutôt qu’aux athlètes.

Déjà en 2018, des sanctions avaient tombé sur les sélectionnés russes après qu’un rapport de l’AMA signalait que la Russie avait entraîné des opérations de dopage pour les Jeux d’hiver de Sotchi 2014. De nombreux athlètes ont été exclus des Jeux olympiques d’hiver à Pyeongchang cette année-là. Néanmoins, 168 russes ont pu participer sous le drapeau olympique en tant qu’ « athlètes olympiques russes ».

De même manière, en 2020, les russes qui prouvent qu’ils n’ont pas d’antécédents de dopage et que leurs résultats de contrôle n’ont jamais été falsifiés par les autorités antidopage russes seront autorisés à concourir à Tokyo comme des athlètes non affiliés. « Il s’agit d’athlètes neutres, c’est-à-dire qu’ils ne représentent aucun pays », a déclaré Jonathan Taylor, président du Comité de révision de la conformité (CRC) de l’AMA.

Après avoir été bannis de Pyeongchang, le pays et son agence antidopage (RUSADA) ont été rétablis sous condition en septembre de cette même année. Or, les responsables russes auraient été pris par surprise au début de 2019 en train de manipuler les données de leur laboratoire antidopage de Moscou et d’induire en erreur les enquêteurs de l’AMA, ouvrant un nouveau chapitre dans le scandale sportif international qui se déroule depuis 2015. Selon, Sir Craig Reedie, président de l’Agence « le dopage russe nuit au sport propre depuis trop longtemps ».  Pour lui, ce sont les responsables antidopage russes qui ont ouvertement enfreint les règles.

Un scandale qui commence en 2015

La Russie est accusée de dopage depuis qu’un rapport de l’AMA publié en 2015 ait révélé des preuves de dopage dans l’athlétisme russe.

En outre, les enquêteurs ont découvert que quelqu’un avait tenté d’impliquer le dénonciateur Grigory Rodchenkov, l’ancien directeur du laboratoire de Moscou, en insérant dans les données des preuves fabriquées suggérant qu’il était impliqué dans un complot visant à extorquer de l’argent aux athlètes.

« Enfin, la fraude, les mensonges et les falsifications d’une ampleur indescriptible ont été punis de plein fouet », a déclaré M. Rodchenkov lundi dans un communiqué. « Les falsifications et les tricheries de la Russie se sont poursuivies en 2019, même lorsque la Russie était sous surveillance. Comme d’habitude, la Russie n’a pas tenu toutes ses promesses et obligations en matière de sport propre. »

Un nouveau chapitre dans le scandale sportif

Novembre dernier, le Comité de révision de la conformité (CRC) de l’AMA avait statué que « les données de Moscou ne sont complètes ni entièrement authentiques », et qu’il y avait « des centaines de résultats négatifs présumés » partagés par un dénonciateur qui ont été exclus du rapport de RUSADA en 2019.  Les enquêteurs ont déterminé que 145 cas avaient été trafiqués et constatèrent que « les données brutes et les fichiers PDF sous-jacents avaient été supprimés ou modifiés ».

Dimanche 8, neuf des 17 membres du comité des athlètes de l’AMA ont envoyé une lettre au conseil d’administration pour demander une interdiction totale des activités sportives russes en compétition. Ce lundi, Linda Hofstad Helleland, législatrice norvégienne et vice-présidente de l’AMA, votait pour les recommandations du CRC et ajoutait qu’une sanction encore plus sévère serait justifiée. Elle a qualifié les actions de la Russie comme le « plus grand scandale sportif que le monde n’ait jamais vu ».

Le même jour, à Lausanne, le comité exécutif de l’AMA votait à l’unanimité pour adopter la mesure.

En plus de l’interdiction de la compétition internationale, le comité a également recommandé d’interdire aux officiels russes de siéger aux conseils et comités liés à la gouvernance sportive internationale. La Russie ne sera pas non plus autorisée à accueillir de grandes manifestations sportives, ni même à demander des droits d’accueil, et le drapeau russe ne sera autorisé à flotter dans aucune grande manifestation. Additionnellement, ces restrictions retireraient l’accréditation de la RUSADA.

Cette décision signifie également que la Russie n’aura pas le droit d’accueillir de grands événements sportifs. Dans un communiqué l’AMA déclarait :  » En outre, la Russie ne pourra se porter candidate pour accueillir les Jeux olympiques et paralympiques de 2032 « .

Les représentants russes ont maintenant 21 jours pour faire appel de la décision auprès du Tribunal arbitral du sport de Lausanne, qui aura le dernier mot. Svetlana Zhurova, députée à la chambre basse du parlement russe, a déclaré que le conseil d’administration de la RUSADA se réunirait le 19 décembre et déciderait d’accepter les dernières sanctions.

« Je suis sûre que la Russie ira devant les tribunaux », « nous devons défendre nos athlètes », affirma-t-elle.

« Hystérie anti-russe » et motivations politiques ?

Les responsables olympiques russes s’étaient préparés à la décision de lundi. Iuri Ganus, directeur de RUSADA, a dès lors appelé à remplacer tout officiel sportif russe qui compte encore sur les anciennes méthodes pour rester compétitifs. « Il est d’une importance capitale de changer d’approche », déclarait M. Ganus à la presse lundi à Moscou. Cependant, Ganus, désestime l’option de l’appel et conclut qu’il n’y a « aucune chance » que la Russie puisse le gagner. Il a depuis qualifié les sanctions de « tragédie » pour les athlètes.

Ce même jour, le Premier ministre russe, Dimitri Medvedev, déclarait en interview télévisé que les décisions prises par l’AMA témoignent d’une « hystérie anti-russe » du fait que grande partie des sanctions « se répètent contre des sportifs qui ont déjà été punis ». Plus tard, le président russe, Vladimir Poutine, approchait les médias pour dénoncer ce qu’il nomma une décision « politiquement motivée » qui n’aurait « rien à voir avec le sport et le mouvement olympique. »

La Russie est historiquement un visiteur régulier sur le podium aux Jeux olympiques. Aux Jeux d’été de 2016 à Rio de Janeiro, année où quelques sportifs d’athlétisme du pays ont été aussi exclus de compétitions en raison de problèmes de dopage, la Russie a quand même envoyé 282 athlètes et remporté 56 médailles, ce qui leur a placé au quatrième rang dans le tableau des médailles. Aux Jeux de 2012, le contingent russe comprenait 436 athlètes, alors la troisième équipe olympique en nombre à Londres, et a remporté 82 médailles.