Covid-19 : l’Europe se paralyse ?

Face à la crise du coronavirus, les gouvernements du vieux continent sont poussés à prendre des mesures d’urgence.

La crise du coronavirus s’aggrave dans le vieux continent. D’après les derniers chiffres, 500 décès sont survenus en Europe par infection du nouvel virus qui atteint a plus de 100 000 personnes dans 80 pays au monde. Face à ce scénario, les gouvernements du continent sont poussés à prendre des mesures d’urgence marquées par la fermeture et la paralysation des activités économiques, culturelles et éducatives.

L’Italie face à la crise

Actuellement, l’Italie est non seulement le pays de ce continent le plus touché par l’épidémie, mais le deuxième avec le plus grand nombre d’infectés au monde, déplaçant ainsi la Corée du Sud du rang qu’elle occupait jusqu’à la semaine dernière.

Après un décret gouvernemental du lundi 9 mars, les 60 millions d’italiens sont désormais en quarantaine et les déplacements sont limités que pour des raisons de travail, d’urgence ou à des permis spéciaux. Les commerces, les centres de rassemblement et les espaces publics sont fermés et les autoroutes sont contrôlées par des barrages de police.

D’après les données de l’agence de protection civile italienne, il y a désormais 9 172 cas confirmés de Covid-19 dans la nation européenne, soit un incrément de 25% dans peu de jours. Parmi eux, 724 seraient guéris et 463 en attente de bilan positif, rapportant le nombre de personnes infectées à 7 985. Malheureusement, 463 morts sont enregistrés ; plus de la moitié des victimes mortelles en Europe.

Face à ces données, le premier ministre italien, Giuseppe Conte, déclarait en conférence de presse que l’Italie vivait son « heure la plus sombre », rappelant les discours de Winston Churchill à l’ère de la Seconde guerre mondiale. L’annonce, transmise à 2 heures du matin, confirmait les mesures prises par son gouvernement ce dimanche, qui interrompent les rassemblements et activités récréatives et culturelles dans la région de la Lombardie et 14 autres provinces.

Avant cela, le Carnival de Venise avait été interrompu, ainsi que plusieurs autres évènements dans la région nord du pays, comme le Fashion Week de Milan qui s’est présentée sans public. Les présentations à la Scala de Milan et l’entrée aux musées ainsi qu’à la Cathédrale et plusieurs monuments de la ville italienne est désormais interdite.

Quelques heures après, un nouvel ensemble de restrictions ont été annoncés par le dirigeant en transmission télévisée. Conte s’est dirigé à nouveau aux italiens le soir du lundi pour décréter l’extension de ces restrictions à l’ensemble du territoire italien et leur demander de rester « chez eux ».

« Nous devons tous renoncer à quelque chose pour le bien de l’Italie », affirmait le premier ministre.

Les ordonnances étaient initialement destinées à combattre la crise dans la région nord du pays, la plus affectée par le Covid-19. C’est aussi le moteur économique de la nation, qui rassemble près du 30% du PIB italien. Un fort impact économique dans les mois à venir paraît donc incontournable pour la péninsule[l1] .

Déjà depuis le 29 février, 11 villages des régions de la Lombardie et la Vénétie ont été confinés et les conditions de vie s’aggravent. Dans cette même région, des émeutes ont éclaté dans 27 prisons italiennes après que plusieurs détenus réclament la reprise des visites familiales. Celles-ci sont restreintes depuis quelques semaines dans le cadre des mesures prises par le gouvernement. 6 prisonniers sont morts lors des soulèvements.

Des mesures similaires en Europe

Dimanche, le gouvernement français a suivi l’exemple de la péninsule italienne et a mis en marche des mesures d’urgence. Désormais, les rassemblements de plus de 1 000 personnes sont interdits en France. Une première restriction des agglomérations de 5 000 gens dans milieux clos était mise en place samedi 29 février, résultant dans la suspension de plusieurs spectacles jusqu’au 15 avril.

À son tour, le musée du Louvre a annoncé la fermeture de ses portes, après que la semaine dernière personnel ait refusé d’assister au travail en raison des risques de santé. Seulement les visiteurs ayant acquis un billet en ligne au préalable de l’annonce seront permis d’entrer. Aussi à Paris, la prière du vendredi à la Grande Mosquée a été annulée, « jusqu’à nouvel ordre » et « conformément aux décisions du ministère des Solidarités et de la Santé, et suivant les avis religieux prodigués par nos imams ».

Additionnellement, des strictes interdictions ont tombé sur les régions françaises les plus affectées. Dans le Morbihan en Bretagne et la Haute-Savoie, ainsi que dans les départements de l’Oise et du Haut-Rhin, les marchés, rassemblements et services religieux sont bannis.

La France est toujours en stade 2, déclaré depuis le 28 février, mais l’idée d’un stade 3 paraît chaque jour plus prochaine. Dans ce contexte, la vie des français pourrait ressembler à celle des italiens, avec les fermetures d’autres centres de rassemblement, institutions scolaires et même une suspension des transports en commun à l’échelle du territoire national.

Jusqu’à mardi, 30 morts et 1606 cas étaient confirmés en sol français, dont celui du ministre de la Culture, Franck Riester, qui a testé positif pour Covid-19 vendredi 6. Cependant d’après son cabinet le ministre est « en forme ». C’est la première infection reportée d’un membre du ministère. Cinq autres fonctionnaires ont été contaminés par le virus à l’Assemblée nationale.

Une crise qui touche aussi les sports européens

D’après l’ordonnance des autorités françaises, les matchs de rugby entre la France et l’Irlande dans le cadre du Tournoi des six nations sera repoussé, de même forme que la rencontre des équipes féminines du Pays de Galles et de l’Écosse, différé après qu’une participante écossaise ait été atteinte par le Covid-19. Le jeu entre Italie et l’Angleterre avait été déjà ajourné la semaine dernière face au risque d’infection.

Également, toutes les activités sportives, y compris les matchs de la Serie A, ont été suspendues en Italie jusqu’au 3 avril, d’après une annonce du Comité national olympique (CONI) de ce pays. Avant cela, la mesure avait été déjà prise pour les jeux dans la région nord, bien que les matchs d’équipes italiens dans la Ligue des champions ou de Ligue Europa n’ont pas été précisés.

Ce lundi, lorsque que 2 premières victimes mortelles aient été enregistrées dans le pays teuton, le ministère de santé allemand annonçait qu’il serait en mesure de changer le déroulement des matchs de la Bundesliga. En France, plusieurs rendez-vous sportifs de Ligue 1 se sont déroulés dans des stades vides depuis quelques semaines. De même, la rencontre entre les équipes nationales de l’Italie et la Slovaquie du 26 mars pourrait se célébrer à huis clos, après que 5 personnes infectées ont été détectés dans le pays d’Europe de l’Est.

Toutes les activités scolaires ont été suspendues depuis à Bratislava dès lors.

Les écoles européennes, suspendues

Cette décision arrive quelques jours après que le gouvernement italien ait ordonné la fermeture de ses écoles. Depuis jeudi 5, les instituts d’éducation primaire et secondaire, ainsi que les crèches, garderies et universités du pays sont closes. Environ 8,7 millions d’étudiants seront affectés par le mandat des autorités, de plus que, dans la région nord, les immeubles scolaires sont fermés depuis le 24 février.

« C’est une décision prudente pour contrôler le virus […] nous avons un système de soins de santé qui risque d’être surchargé », déclarait le premier ministre italien, Giuseppe Conte dans l’annonce du mercredi. À Lombardie, où près de 10 millions de personnes y habitent, les patients sont soignés dans les couloirs des hôpitaux.

En plus de l’Italie et la Slovaquie, l’Espagne vient de fermer toutes ses écoles à Madrid face aux 1000 cas de Covid-19. La France a également dû fermer 120 écoles dans l’Oise et la Haute Savoie.

Les mesures prises pour les institutions scolaires en Europe suivent l’exemple de plusieurs pays en Asie de l’Est. Début mars, le Japon décidait fermer ses écoles pour un mois, au minimum, de même que le Hong Kong et la Chine, épicentre de l’épidémie. Dans ce dernier, un programme d’apprentissage en ligne a été mis en place pour remédier la situation de ses étudiants.

Des pays particulièrement vulnérables

Paradoxalement, la fermeture des espaces de rassemblement des jeunes pourrait contribuer à prévenir l’infection dans le secteur de la population le plus au risque : les personnes âgées.

D’après les données de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), les personnes âgées de 80 ans ou plus représentent les taux de mortalité les plus élevés des cas de Covid-19 enregistrés jusqu’à la date. Ce risque augmente aussi avec des conditions médicales sous-jacentes selon l’OMS.

En France, le gouvernement a fortement conseillé à sa population d’éviter visiter les personnes les plus âgés. C’est une mesure de protection qui pourrait être prochainement recommandée dans toutes les nations européennes. L’Italie est le pays avec la population la plus vieillissante du continent et le deuxième au monde, après le Japon. Pour sa part, la France se trouve elle aussi parmi les quinze premières nations de cette liste, pendant que 9 des 10 pays les plus vieillissants sont européens.

Un bilan économique compliqué pour l’Europe

Face à l’épidémie, le scénario économique pour la France et l’Italie s’avère turbulent. D’après Laurence Boone, chef économiste de l’OCDE, les analystes prévoient « une croissance nulle […] avec un premier trimestre négatif, suivi d’une lente récupération » pour l’Italie, en 2020.

Dans un pays où l’industrie du tourisme compte pour environ 13% du PIB, les rapports d’une baisse de presque 32 millions de visiteurs, prévue pour la période de mars à mai, signifierait des pertes de quelque 7,4 milliards d’euros. Déjà au début de la crise, près d’un quart des réservations des hôtels en Milan ont été annulées.

Le 6 mars, le gouvernement de Giuseppe Conte a annoncé un programme budgétaire extraordinaire pour faire face à la crise. La mise en place de 7,5 milliards d’euros pour palier les effets négatifs du coronavirus, serait destinée à l’apaisement des services sanitaires et au soutien des familles et les secteurs économiques les plus affectés. Cependant, cette décision représenterait aussi une hausse dans le déficit italien, calculé à 2,5% pour 2020.

Hormis, ni les annonces ni les mesures ont eu un effet positif dans la Bourse italienne, qui était en baisse de 10% en après-midi de ce lundi 9.

L’an dernier, le pays péninsulaire a connu sa pire croissance du PIB (+0,3%) depuis 2014. Avec la crise épidémique en plein essor dans son territoire, l’Italie risque fortement d’entrer en récession. De plus, d’après un rapport de la Commission européenne publié par Bloomberg, la France serait aussi en voie de récession technique en raison des effets du coronavirus. Lundi 9, la Banque Centrale confirmait son  rapport à la baisse pour l’économie française.

Telle tendance des économies nationales serait en mesure d’entrainer un « cercle vicieux » pour l’ensemble des marchés européens. Mardi 10, l’organisme ING reportait une possible récession en Belgique.


 [l1]Le chef d’état-major de l’armée est l’une des dernières personnes à avoir été testées positives en Italie. Salvatore Farina a déclaré qu’il se sentait bien et qu’il s’isolait.

L’épidémie de virus reste centrée sur la région riche et peuplée de Lombardie, autour de Milan, et sur les régions voisines de Vénétie et d’Émilie-Romagne, mais les cas se propagent dans toute la péninsule italienne.

Mercredi, le gouvernement a publié une directive enjoignant aux responsables du secteur public de réorganiser les bureaux pour permettre au personnel de travailler à domicile.

Le lobby industriel Confindustria a déclaré que le pays était en récession, prévoyant une chute du produit intérieur brut au premier et au deuxième trimestre de cette année.

Confturismo, la confédération de l’industrie du tourisme, a déclaré mercredi que le secteur était « à genoux ».

Elle prévoit une baisse de quelque 32 millions de touristes italiens et étrangers de mars à mai, avec une perte pour l’industrie de quelque 7,4 milliards d’euros (8,2 milliards de dollars).

Source de l’image : cnbcfm.com