Il y a quelques mois, Readwriteweb a couvert le lancement de Silentale, un service qui vous permet d’agréger et d’archiver toutes vos conversations en ligne. En plus des fonctionnalités de backup et de recherche universelle, Silentale analyse aussi vos contacts et merge les doublons. Par exemple, si votre collègue de travail se nomme @mimi sur Twitter et midupond sur LinkedIn, Silentale va comprendre qu’il s’agit de la même personne, et va donc merger vos discussions sur Twitter et LinkedIn dans le même fil de conversation. En d’autres termes, nous dispatchons nos conversations en ligne, et Silentale nous les repatche automatiquement.
Agréger l’ensemble de nos discussions numériques sous un même toit est une idée qui a traversé l’esprit de plus d’une personne. Il convient donc de prêter un peu plus d’attention au réel potentiel de croissance de Silentale. Je suis allé m’entretenir avec son PDG, Laurent Fiéral-Pierssens, afin de pousser un peu plus loin la réflexion sur son entreprise.
En termes de confidentialité, il est bien précisé sur le site que ce qui se passe sur Silentale reste sur Silentale. Les connexions d’accès aux différents services de communication (email, Twitter…) se font via OAuth, ce qui nous évite de partager nos identifiants avec Silentale. Techniquement, une fois que toutes nos communications ont pris pour résidence secondaire Silentale, elles sont tout aussi sécurisées que sur Gmail ou Linkedin. Cependant, pour l’utilisateur non-technique, il faut plus qu’un OAuth (terme qu’il ne comprend pas) pour apaiser les peurs liées au partage de données confidentielles en ligne.
Pour illustrer cette problématique, je me permettrai de rapporter des propos que j’ai échangé avec Freddy Mini de Netvibes. Je lui avais demande ce qu’il pensait de PageOnce, le service qui vous donne accès a toutes vos activités financières sur une seule page: facture d’électricité, de téléphone, de carte de crédit, points ciel, compte bancaire… Le PDG de Netvibes applaudissait la réalisation technologique du produit (dont le concept d’utilisation est proche de celui de Netvibes), mais son two-cents était qu’un service nécessitant un partage de confidentialité ne peut provenir que d’une marque forte, en laquelle les utilisateurs ont confiance avant même de tester le service (comme Netvibes ;).
Avec Silentale, il n’est pas question de partage de compte bancaire, mais il est possible que des infos tout aussi sensibles trainent sur un email ou un texto. Ceci démontre effectivement que Silentale fait face a une problématique de marque centrale a son développement…
Silentale a développé un système de permutation qui permet de repérer une même identité derrière différents profils sociaux. Au niveau de la concurrence, plusieurs autres applications apportent leurs solutions au problème, dont Xobni. Xobni est une application pour Outlook qui, tout comme Silentale, identifie les différents profils sociaux de vos interlocuteurs, et vous offrent une vision plus globale sur vos communications. Xobni a 3 millions d’utilisateurs (pour 100 millions d’utilisateurs Outlook), ce qui valide l’existence d’un marché demandeur. Laurent Fieral-Pierssens explique que l’énorme différenciateur entre Xobni et Silentale, c’est que son entreprise héberge ses données dans le cloud, ce qui multiplie exponentiellement le potentiel d’exploitation de ces données. Je me suis donc permis de contacter Matt Brezina, PDG de Xobni, en lui demandant si son entreprise avait préparé sa migration dans le cloud, et il m’a répondu « we haven’t announced yet » (bluff?). Leur première application mobile (pour Blackberry) est en alpha depuis presque un an.
Il se peut effectivement que Xobni n’entre jamais en compétition frontale avec Silentale, mais cet exemple illustre fort bien comment, dans ce marché en particulier, un produit indirectement concurrent représente tout de même une menace directe. C’est presque sûr que Xobni a migré vers le cloud puisque la plupart des spécialistes pouvaient anticiper que Microsoft les bougerait un jour de leur petit Outlook douillé…
Silentale met à disposition des développeurs une interface programmable (API) qui leur permet de développer des applications alimentées par les données de Silentale. Afin de lancer la mécanique, Silentale a développé deux extensions Firefox. Une des applications Firefox permet de reconnaitre vos contacts derrière n’importe quel profil social (LinkedIn, Plaxo, Friendfeed, Facebook, Salesforce…) sur lequel vous naviguez. Une fois le contact identifié, ses données s’affichent dans la sidebar du navigateur, suivi des dernières communications que vous avez eu avec cette personne. Cette extension est un bel exemple du potentiel derrière Silentale.
Une application mobile tourne en alpha sur les iPhone des membres de l’équipe Silentale, mais il n’y a pas de date de lancement officiel. La composante mobile est critique pour Silentale, car c’est celle-ci même qui va permettre d’intercepter et de storer nos sms (et probablement plus).
L’API Silentale est le relais d’échange le plus stratégique de la startup. Comme j’argumentais plus haut, Silentale fait face à une problématique de marque liée au partage de données confidentielles. Une solution à cela consiste à aller chercher des partenariats avec des grands fournisseurs de service déjà bien établi, et offrir d’intégrer Silentale à leurs solutions de communication. Pour garantir la mise en place de partenariats stratégiques, Laurent Fiéral-Pierssens a mis sur pied une équipe d’experts qui ont tous occupés des rôles directionnels au sein d’entreprises telles que Netscape, AOL ou Yahoo. Une telle stratégie s’inscrit dans la durée, et pour tenir, Silentale va avoir besoin de cash. En termes d’investissements, tout ce que le PDG de Silentale a voulu me confier est que le lancement de Silentale est financé par des business angels européens et nord-américains, et que l’entreprise est à l’œuvre pour organiser une nouvelle levée de fonds.
Il est aujourd’hui impossible de pronostiquer ce que l’avenir réserve pour Silentale. Son succès dépendra de sa flexibilité à répondre aux besoins et aux menaces du marché, aux types de partenariats que la startup réussira à concrétiser, ainsi qu’à la mise en évidence d’une plus-value dans l’écosystème du Web qui ne pourra être attribuable à personne d’autre que Silentale. Par exemple, avec les données hébergés chez Silentale, un commercial pourrait analyser le rôle qu’occupe chaque outil de communication dans son processus de vente. Silentale pourrait mettre en évidence le fait que sur 100 prospects, 65 ont été contactés pour la première fois sur Twitter, et 80 ont donné un accord d’achat via email, mais peut être que ces 60 sur ces 80 ont donné leur accord d’achat via email uniquement après avoir connecté et communiqué via LinkedIn… En storant nos données, Silentale s’offre le potentiel de mieux organiser nos communications, mais aussi de mieux nous faire comprendre les dynamiques interactionnelles en jeu dans nos communications numériques. Indéniablement, beaucoup de personnes paieraient pour ce genre de service.