PDF et DOC sont encore la norme des supports utilisés pour partager des idées sur un ordinateur. Souvent, ce type de documents est voué au partage entre quelques personnes, ou aux membres d’un organigramme, mais cela va rarement plus loin. Pour prolonger l’accessibilité d’un document dans la sphère publique, plusieurs solutions existent en ligne telles que Scribd, Docstoc, Docshare, le Webex de Adobe, et j’en passe. Aujourd’hui, nous avons un nouvel acteur dans l’espace du partage de documents en ligne: Evadoc.
A l’origine, Evadoc est un projet d’école mene par trois étudiants de l’ESSEC, Louis-Marie de Langlois, Jean-Baptiste Coudriou et Geoffroy de Boisbaudry. L’objectif principal est d’offrir une solution de partage de documents en ligne exclusivement franco-francaise. Pour Evadoc, les Francais n’utilisent pas assez les sites de partage de documents en ligne car ceux-ci ne sont pas traduits dans leur langue. C’est sur cette opportunité qu’Evadoc compte capitaliser.
Le me-too de Scribd
Geoffroy de Boisbaudry nous a affirmé que Scribd et Evadoc étaient exactement pareil, un vrai me-too, à la différence près de la langue. Une telle affirmation méritait d’être vérifiée, donc je propose ici de comparer Scribd et Evadoc, afin de valider ou invalider les propos de l’équipe fondatrice.
1. L’upload:
Scribd et Evadoc permettent l’upload de plusieurs documents en même temps. Les temps de chargement sont les mêmes. Avec Evadoc, il faut attendre la fin de tous les uploads avant de pouvoir éditer les titre/description/catégorie/tags et de partager les documents avec d’autres personnes. Avec Scribd, comme avec Youtube, l’ajout des titre/description/catégorie/tags se fait en même temps que l’upload, un sacré gain de temps dans un contexte de multi upload.
2. La page d’accueil:
La page d’accueil d’Evadoc est assez rudimentaire, avec des couleurs fades et peu attractives. Scribd et Evadoc proposent une catégorie « lu en ce moment ». Evadoc propose aussi une catégorie « les plus populaires » alors que Scribd déniche des documents d’entreprise ou à caractère nouveau et intéressant.
3. La decouverte de documents:
Sur Scribd, on peut s’inscrire a l’activité d’autres utilisateurs (tels que Barack Obama), explorer des documents par catégorie, découvrir les « trending » documents, ou encore découvrir des sujets évoqués au sein de documents. Sur Evadoc, on peut explorer les documents par catégorie ou en s’inscrivant à divers groupes.
4. Le document social:
Scribd est complètement intégré avec Facebook et Twitter. On peut d’ailleurs s’inscrire sur Scribd avec ses identifiants Facebook. Toute l’activité d’un utilisateur sur Scribd peut être auto-partagée sur ses comptes Facebook et Twitter. Evadoc possède des fonctions similaires de partage, mais aucune intégration type Facebook.
5. Lecteur de document Flash:
Voila un aspect sur lequel Evadoc entre en competition frontale avec Scribd: son lecteur de documents est plus léger, donc plus portable, que celui de Scribd. Cependant, tout comme Scribd, le lecteur de documents d’Evadoc en Flash, et donc non compatibles avec l’iPhone.
Du nouveau
De toute évidence, on ne peut pas reprocher à Evadoc de n’en être qu’à l’aube de son aventure, il est donc normal que la startup ait quelques trains de retard sur les leaders du marché. Cependant, la petite boîte court, et va annoncé cette semaine plusieurs changements clés à sa v1:
Différents flux RSS pour les nouveaux documents, pour chaque catégorie ou global
Possibilité de « suivre » un membre : équivalent d’un abonnement aux documents que poste une personne (follow)
Plus de personnalisation des pages d’un membre : couleurs, avatar, etc.
Utilisation des licences Creative Commons pour les publications des membres
Refonte graphique
Avec son approche franco-francaise, Evadoc cible les milieux universitaires ou administratifs effectivement demandeurs de solutions simples pour mettre certains documents publiques a la disposition de tous. Evadoc est loin du stade de la monetisation, mais si l’equipe devait miser sur un poulain, ca serait sur le developpement d’une plateforme de vente de documents. Oodoc a deploye ce type de business model et il semblerait que cela leur reussi plutot bien.
Le risque de l’opportunisme
A la base, Evadoc a vu le jour grace à la motivation exceptionnelle d’une poignée d’étudiants, le site compte aujourd’hui plus de 5 000 créations de compte. Cependant, en s’exposant de plus en plus, Evadoc doit aussi montrer que son modèle est fiable. D’autant plus que jusqu’à présent, Evadoc ne fait preuve d’aucune ambition de différentiation technologique, et préfère se concentrer sur une stratégie me-too but in French. Cette focalisation sur la langue (et non sur l’innovation technologique) est risquée, et on en vient à se demander ce qu’il adviendrait si un leader du partage de documents en ligne décidait d’attaquer agressivement le marché francophone.
Pour répondre à cette question, je me suis tourné vers Trip Adler, co-fondateur et CEO de Scribd, pour savoir de quelle manière un leader du partage de documents en ligne appréhende cette multiplication de la compétition étrangère. Voici son commentaire
We’re excited that there is so much movement in the space. Competition leads to better products which ultimately makes the Internet better. Scribd’s document reader currently supports over 100 languages (including French), and we plan to internationalize all the text on the website.
En d’autres termes, Scribd compte bien proposer une version complètement française de son site. Ceci signifie qu’Evadoc va devoir plancher sur une réflexion de différenciation au niveau technologique, car être Français n’est pas un argument différentiateur suffisant. En se cherchant une originalité technologique, Evadoc ferait bien de se chercher un slogan original, car « le Youtube des documents » a déjà été utilisé par… Scribd.