L’économie de la playlist

Certaines playlists sont devenues des rampes de lancement pour les nouveaux artistes ou les nouveaux morceaux à faire connaître. Retour sur un nouvel outil marketing pas encore bien maîtrisé.

L’avènement du streaming a projeté la playlist musicale/de musique sur le devant de la scène : elle devient un tremplin parfois inespéré pour les artistes et un outil marketing de choix pour les plateformes. Ces dernières ne s’y trompent pas et multiplient les stratégies pour augmenter les écoutes, à l’image de Spotify demandant à Obama de devenir son président des playlists. Façonnant l’industrie musicale mais aussi la musique elle-même, on assiste à l’émergence d’une véritable économie de la playlist.



Apparaître dans une playlist oui, mais pas n’importe comment

La playlist musicale peut devenir un véritable panneau publicitaire pour un artiste. L’augmentation du nombre d’écoutes et la visibilité procurée ne sont pas négligeables : dans le meilleur des cas, l’effet de buzz peut multiplier par trois les écoutes. L’artiste Michael Brun est passé de moins de 300 000 à plus de 800 000 écoutes par semaines après avoir figuré sur deux des playlists les plus écoutées de Spotify.

Dans cette nouvelle économie de la playlist, convaincre les influenceurs d’intégrer ses morceaux dans leur playlist est essentiel, mais cela ne fait pas tout. Si les utilisateurs sautent trop souvent le morceau, celui-ci peut être supprimé de la liste. Le positionnement du morceau dans la liste est donc stratégique, surtout s’il vient d’un artiste peu connu. Trop haut, le morceau sera beaucoup écouté mais souvent sauté par des utilisateurs cherchant un son familier. Trop bas, il sera moins écouté, mais sauté moins souvent, l’utilisateur ayant baissé sa vigilance après plusieurs titres. Face à tout ces paramètres à prendre en compte, rendant encore plus tangible l’idée qu’une économie de la playlist se développe bel et bien, Spotify a mis à disposition des artistes l’outil statistique Fan Insight, qui permet notamment de vérifier quelle influence a une playlist musicale/de musique sur un morceau.



Pour fédérer sa communauté, créer sa propre playlist et la mettre à jour régulièrement permet de créer une habitude chez le consommateur, qui reviendra ensuite écouter les morceaux proposés. Néanmoins, cette stratégie perd son intérêt depuis que certaines plateformes majeures mettent en avant leurs propres playlists, au détriment de celles des utilisateurs.

Une influence pour la musique elle-même ?

Au-delà des stratégies de placement, ces nouveaux enjeux modifient également le contenu des morceaux, voire d’albums entiers pour s’adapter à l’économie de la playlist. L’artiste étant payé au nombre d’écoutes, il a tout intérêt à sortir un album ayant plus de morceaux, quitte à sacrifier leur longueur. Un plus grand nombre de morceaux maximise aussi les chances des figurer sur une playlist de musique. C’est donc un réel bouleversement dans l’industrie musicale que l’émergence de cette nouvelle économie. S’il est indéniable que figurer sur une playlist devient un enjeu tactique pour les labels, il est probable qu’on assiste à la naissance de morceaux taillés pour les playlists, à l’instar de ceux taillés spécialement pour la radio.